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504. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Introduction. » pp. -

Voilà la conception maîtresse, qui consiste à ériger le devoir en roi absolu de la vie humaine, et à prosterner tous les modèles idéaux au pied du modèle moral. […] Après tout, cette sorte de tableau idéal, le géométrique comme le psychologique, n’est guère complexe, et on voit assez vite les limites du cadre où les civilisations, comme les cristaux, sont forcées de se renfermer. […] Si, au contraire, la conception générale à laquelle la représentation aboutit est une création poétique et figurative, un symbole vivant, comme chez les races aryennes, la langue devient une sorte d’épopée nuancée et colorée où chaque mot est un personnage, la poésie et la religion prennent une ampleur magnifique et inépuisable, la métaphysique se développe largement et subtilement, sans souci des applications positives ; l’esprit tout entier, à travers les déviations et les défaillances inévitables de son effort, s’éprend du beau et du sublime et conçoit un modèle idéal capable, par sa noblesse et son harmonie, de rallier autour de soi les tendresses et les enthousiasmes du genre humain. […] Une certaine conception dominatrice y a régné ; les hommes, pendant deux cents ans, cinq cents ans, se sont représenté un certain modèle idéal de l’homme, au moyen âge, le chevalier et le moine, dans notre âge classique, l’homme de cour et le beau parleur ; cette idée créatrice et universelle s’est manifestée dans tout le champ de l’action et de la pensée, et, après avoir couvert le monde de ses œuvres involontairement systématiques, elle s’est alanguie, puis elle est morte, et voici qu’une nouvelle idée se lève, destinée à une domination égale et à des créations aussi multipliées.

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