Oui, c’est bien quelque chose d’analogue que nous trouvons chez Proust ; l’analogie serait à pousser et à mettre au point ; j’en vois encore un aspect que je vous indique en courant : dans le cubisme mélange d’éléments idéaux ou psychologiques de l’objet avec des éléments au maximum concrets ; je fais allusion aux fameux trompe-l’œil, bouts de carton collés sur la toile, lettres de journaux, etc… ; chez Proust constant mélange, dans la description, d’un élément intérieur, émotif, d’ailleurs construit comme s’il faisait partie des choses, et d’un élément photographique (conversations, gestes, attitudes reproduites avec une fidélité absolue, presque servile). […] Ainsi dès l’enfance, en même temps qu’il recevait le monde en lui comme une envahissante merveille, Proust sentait un « devoir de conscience ardu » — c’est sa propre expression — qui le poussait à le comprendre, à lui arracher quelque chose de plus que lui-même, à découvrir la réalité (matérielle ou idéale, il ne savait encore) cachée « sous le revêtement des images ». […] Et c’est parce qu’il n’en trouvait pas qu’il se croyait dépourvu de talent…) Pourtant ce qu’il cherche, ce qu’il désire, Proust perd assez vite l’idée que ce puisse être quelque chose de vraiment extérieur, quelque chose comme une statue idéale qui serait logée derrière les spectacles qu’il contemple et qu’il n’aurait qu’à dévoiler.