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4203. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre quatrième. La connaissance des choses générales — Chapitre II. Les couples de caractères généraux et les propositions générales » pp. 297-385

Beaucoup d’hommes et beaucoup de peuples ne vont pas au-delà. […] Au couple d’idées abstraites associées dans notre esprit correspond, trait pour trait, un couple de caractères abstraits associés dans la nature ; désormais, à chaque cas nouveau que nous observons, notre proposition reçoit une justification nouvelle, et la loi énoncée ne rencontre plus d’exceptions. — Au bout d’un temps fort long, après beaucoup de correspondances ainsi vérifiées, les hommes de certaines races et de certaines civilisations, les Européens modernes par exemple, ont fini par croire qu’il en est ainsi dans tous les cas, que telle est la constitution des choses, que toute la nature est régie par des lois, que tout son cours est uniforme, qu’en tout temps et en tout lieu, dans le monde moral et dans le monde physique, tout caractère donné a des conditions dont la présence entraîne sa présence. […] J’imagine un homme qui n’est pas géomètre et qui, par la structure de son cerveau, est incapable de le devenir, mais très patient, très exact et très habile à induire ; je lui mets en main un demi-cercle divisé en minutes et en secondes pour la mesure des angles ; je trace devant lui une quantité de triangles, je lui enseigne à en tracer d’autres, et je le prie de chercher si, dans tous ces triangles, la somme des angles n’égale pas une certaine somme d’angles droits. — Pendant plusieurs journées, il applique son demi-cercle aux angles de trois ou quatre cents triangles ; pour chacun d’eux, il regarde sur son demi-cercle les trois valeurs des trois angles, et, additionnant ces valeurs, il trouve toujours que leur somme est de 180 degrés ou de deux droits.

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