Il a prétendu l’un des premiers parmi nous, et il prétendit jusqu’à la fin, que les hommes de génie dans les divers genres ne sauraient avoir pour mission de tarir ou d’immobiliser les sources où l’esprit humain doit puiser après eux, et qu’on est plus près de les imiter dignement en s’adressant comme eux à la grande source directe et inépuisable de la nature et de la vie, qu’en se modelant froidement sur les formes où ils ont coulé une fois leurs chefs-d’œuvre. […] Ramond en appelait volontiers de Buffon jugeant des glaciers à Montbard, à Buffon s’il avait lui-même vu les montagnes ; mais là où il s’écartait de ses idées, il le définissait encore avec respect « ce grand homme par qui, tous tant que nous sommes, nous raisonnons bien ou mal d’histoire naturelle et de géologie ». […] Il est évident par mainte page qu’il croyait pleinement alors à la facilité de gouverner les hommes, ou plutôt de les laisser se gouverner tout seuls. […] Ce manuscrit, avec beaucoup d’autres papiers, contenant le fruit de quinze années de travaux assidus, fut pillé et détruit en 1814 par les Cosaques : « C’est venir de bien loin, remarquait-il avec une douce plainte, pour faire du mal à un homme qui n’en veut à personne. » Les Voyages au Mont-Perdu me semblent le plus classique des deux ouvrages de Ramond. […] Nous sommes moins susceptibles aujourd’hui, et Cuvier, dans le portrait assez complet qu’il a donné de l’homme, ne nous paraît avoir excédé en rien les limites permises.