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846. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « L’abbé Gratry »

C’est de l’histoire maintenant. […] Il n’y a plus d’être absolu. » Aussi, cela posé une fois pour toutes, l’abbé Gratry, avec la magnifique souplesse et la magnifique étendue de l’instrument logique dont il dispose, force-t-il la pensée philosophique à s’établir dans le terre-plein de l’humanité et de l’histoire, et, sous peine de se détruire elle-même, à n’en plus sortir. […] D’autres esprits, non moins nombreux, estimeront, nous n’en doutons pas, que reporter la philosophie dans l’histoire, que l’arracher à l’abstraction, c’est diminuer d’autant la philosophie, et l’orgueil mis sur la croix à son tour poussera son grand cri… Mais tant mieux ! […] Ainsi, dans ce livre éminent, la métaphysique, à propos de la question de Dieu qui domine toutes les philosophies, fait la contre-épreuve de l’histoire, et le philosophe arrive par son chemin couvert, par la route interne de la réflexion, à la conclusion extérieure des faits mystérieux qui gouvernent le monde. […] Pour nous, qui ne sommes pas philosophe et qui ne nous vantons que d’être chrétien, le mérite du Traité de la Connaissance de Dieu est bien au-dessus d’un mérite purement scientifique, et nous l’admirons principalement parce qu’il arrive de toutes parts aux conclusions du bon sens, de la tradition, de l’histoire.

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