» Ernest est parfait, mais il n’est pas idéal ; mais, après cette amère et religieuse douleur d’une amie morte pour lui, morte entre ses bras, après cette sanctifiante agonie au sortir de laquelle l’amant serait allé autrefois se jeter dans un cloître et prier éternellement pour l’âme de l’amante, lui, il rentre par degrés dans le monde ; il trouve moyen, avec le temps, d’obéir à l’ordre de celle qui est revenue à l’aimer comme une mère ; il finit par se marier et par être raisonnablement heureux. […] nous sommes bien heureux ! […] Trouvez-vous qu’une religieuse défroquée, qu’un cadet cardinal (les Tencin), soient heureux, comblés de richesses ? […] Mais, nous autres, nous sommes devenus plus raisonnables apparemment qu’on ne l’était même sous Louis XV ; nous savons concilier à merveille la religion des morts et notre convenance du moment ; nous avons des propos solennels et des actions positives ; le réel nous console bonnement de l’invisible, et c’est pourquoi l’historien de Mlle de Liron n’a été que véridique en nous faisant savoir qu’Ernest devint raisonnablement heureux. […] Nous avons été assez heureux depuis pour démontrer positivement le contraire, et de la seule manière dont ces sortes de choses peuvent se démontrer, par l’alibi (voir Derniers Portraits ou, ce qui revient au même, le tome III des Portraits littéraires, édit. de 1864).