Les théories de l’« Art poétique » (Fin) Quand on sait combien Boileau a été insouciant de l’histoire et des formes accidentelles qui manifestent diversement l’unité essentielle du type humain, on ne s’attend guère à rencontrer dans l’Art poétique, au IIIe chant, à propos de la tragédie, des vers tels que ceux-ci : Des siècles, des pays, étudiez les mœurs ; Les climats font souvent les diverses humeurs. […] Il estime que tout peut se dire élégamment et noblement, et qu’il ne s’agit que de trouver le tour : le tour, ce triomphe de l’art d’autrefois, que nous ne connaissons plus guère. […] Enfin, voici le passage décisif, et qui ne laisse subsister aucun doute : Les grands mots, selon les habiles connoisseurs, font en effet si peu l’essence entière du sublime, qu’il y a même dans les bons écrivains des endroits sublimes dont la grandeur vient de la petitesse énergique des paroles, comme on le peut voir dans ce passage d’Hérodote, qui est cité par Longin : « Cléomène étant devenu furieux, il prit un couteau dont il se hacha la chair en petits morceaux, et s’étant ainsi déchiqueté lui-même, il mourut. » Car on ne peut guère assembler des mots plus bas et plus petits que ceux-ci : se hacher la chair en morceaux, et se déchiqueter soi-même.