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302. (1892) Boileau « Chapitre III. La critique de Boileau. La polémique des « Satires » » pp. 73-88

Boileau, laissant de côté l’érudition et la diffamation, offrit aux honnêtes gens des jugements sincères, que le goût seul et un certain idéal de perfection littéraire dictaient. […] Les éloges éclairant les attaques, le public sentit que cette fois les personnalités n’étaient pas la fin et le terme de la satire, que ce n’était pas tel ou tel auteur, mais toute une littérature, toute une doctrine et toute une forme du goût qui étaient en jeu, et qu’enfin ce satirique était un critique, tandis que les critiques jusque-là n’étaient que des satiriques. […] Il y avait plus d’un siècle que se préparait la forme littéraire dont il devait fixer le caractère, et sa doctrine était le terme où l’on devait nécessairement aboutir, lorsque les belles œuvres de l’antiquité païenne eurent éveillé le goût français, et lorsqu’en même temps leur sagesse toute naturelle et toute humaine eut inspiré à la raison moderne la hardiesse de marcher en liberté selon ses lois intimes. L’évolution fut achevée, quand, aux environs de 1660, dans le jugement ou dans l’instinct de quelques grands écrivains et de leur public, la conciliation fut faite entre l’admiration des anciens, maîtres de l’art et guides du goût, et l’indépendance de la raison, plus confiante chaque jour en ses forces, et plus rebelle à toute autorité. […] À ce triple titre, et par l’autorité que ses lumières et sa facilité lui avaient value, il représentait pour Boileau le goût de l’école à laquelle il faisait la guerre.

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