Impérieux et subtil, sûr de ses lumières, l’auteur des Études lyriques se faisait gloire, pour éberluer les doctrinaires de l’individualisme et outrance et des singularités passionnelles, de n’illustrer en vers que des lieux communs. […] Oscar Wilde, encore qu’il se défendît d’obéir aux préjugés, subissait à son insu cette hostilité héréditaire et s’il avait retrouvé, à Londres, cette même rigueur puritaine, cette même obstination hypocrite du cant (on sait que les Irlandais se font gloire d’un haut renom de chasteté) dont sa libre et sensuelle nature avait à souffrir, il se sentait doublement incité à s’en affranchir par instinct et par désir de faire pièce à une race détestée. […] Alcibiade, chez les Grecs, et Pétrone, chez les Romains, avaient essayé de remonter un courant de vulgarité, mais pour que cet état d’esprit, que l’on a nommé le dandysme, prît toute sa valeur et sa force cohésive, il y fallait des conditions spéciales et la mentalité singulière d’un peuple qui se fait gloire d’une vertu que Stendhal juge d’un ridicule stupide et dont Remy de Gourmont se moquait avec tant d’insistance. […] Quand Baudelaire blasphémait, quand Wilde colportait de salons en salons ses épigrammes d’athée27, ils n’encouraient que la disgrâce des auditeurs dévots, ce dont ils pouvaient aisément se consoler ; quand Brummel dictait ses arrêts, il risquait sa tête et l’on peut dire qu’il eût la gloire de la risquer en beau joueur.