La première, la plus saillante, la plus intéressante des deux, le Scarabée d’or, a ces touches extraordinaires qui annoncent et, promettent ce phénomène intellectuel qu’on appelle le génie fantastique, plus rare que tout autre genre de génie. […] An mois d’octobre 18.., un soir, notre auteur alla visiter son ami, et il le trouva dans son ermitage, livré à un véritable enthousiasme de naturaliste, parce qu’il avait découvert un bivalve inconnu formant un nouveau genre, mais surtout un scarabée qu’il croyait être aussi entièrement nouveau. […] Mais le silence de sa notice sur l’éducation morale, nécessaire même au Génie pour qu’il soit vraiment le Génie, genre d’éducation qui manqua sans doute à Edgar Poe ; et, d’un autre côté, le peu de place que tiennent le cœur humain et ses sentiments dans l’ensemble des œuvres de ce singulier poète et de ce singulier conteur, renseignent suffisamment — n’est-il pas vrai ? […] C’est l’application du mot de Bacon : « Les hommes ont peur de la mort comme les enfants ont peur de l’ombre. » Cette peur des sens soulevés prend mille formes dans les Histoires de Poe ; mais soit qu’elle se traduise et se spécifie par l’horreur qu’il a d’être enterré vivant, ou par le désir immense de tomber, ou par quelque autre hallucination du même genre, c’est toujours la même peur nerveuse du matérialiste halluciné. […] Edgar Poe, le fils de l’aventure et de l’aventure infortunée, est aussi le plus souvent un aventurier d’inventions malheureuses, quoiqu’il y ait quelques-uns de ses Contes qui, le genre admis de cette littérature matérialiste et fébrile, semblent réussis.