En assumant publiquement son rôle, le critique prenait pour admis que son verdict représentait non seulement son opinion personnelle, mais celle de nombreux lecteurs, et quand il manifestait son approbation ou sa désapprobation à l’endroit de l’œuvre dont il discutait, il avait soin de s’en rapporter aux règles, c’est-à-dire, en définitive, aux appréciations plus générales de critiques antérieurs, et en dernier lieu, à Aristote. […] Taine aboutit à cette conclusion de sa préface qui résume la pratique de son système : « J’entreprends d’écrire l’histoire d’une littérature et d’y chercher la psychologie d’un peuple. » C’est là sa théorie générale ; il en reprend un point particulier dans la première partie de la Philosophie de l’art, où il traite de l’influence qu’exerce sur l’artiste le milieu historique et social dans lequel il se trouve placé, abstraction faite de sa race, de son habitat. […] Taine expose ici comment la part que prend l’artiste à toute la situation de ses contemporains, son imitation des traits marquants de leur état d’âme, sa soumission aux conseils qu’il reçoit et à l’accueil qui est fait à ses œuvres, détruiront dans son esprit les tendances peu conformes au caractère général de l’époque ou l’empêcheront tout au moins de les manifester. […] En termes plus brefs, l’esthopsychologie n’a pas pour but de fixer le mérite des œuvres d’art et des moyens généraux par lesquels elles sont produites ; c’est là la tâche de l’esthétique pure et de la critique littéraire. […] D’autre part, ayant à déterminer d’une façon précise et individuelle, la nature de l’esprit d’artiste qu’elle veut connaître, elle est obligée de recourir aux notions générales sur l’intelligence humaine que donne la psychologie ; et s’appliquant à démêler les groupes naturels d’hommes auxquels un artiste peut servir de type, elle est contrainte de s’adresser à la sociologie et à l’ethnologie.