Or, c’est lui, Alfred de Musset, qui le premier, en France, nous apprit le nom fascinant et menteur de Leopardi, qui cache en ses huit lettres tout ce qu’il y a de moins léopard au monde… Sous le rayon de quelques vers de de Musset, lueur de lampe dans un caveau funèbre, le poète italien brillait mystérieusement, depuis ce temps-là, dans la pénombre d’une langue étrangère, toujours d’accès plus ou moins difficile ou désagréable à l’esprit français. […] Vernier… Poète, romancier, fantaisiste et sceptique, ayant dans l’esprit le je ne sais quoi de français qui répugne, non pas à la tristesse d’une heure, mais à la lamentation éternelle, à la complainte infinie, au Jobisme à poste fixe et bête, — qui n’a pas même Dieu pour excuse, car Leopardi est athée, — comme il a dû souvent s’interrompre, M. […] Dans un pays de la forte nationalité du nôtre, qui est tout l’univers avant d’être français, et dont les gentilshommes — s’il y a encore des gentilshommes — mettent pour courir les culottes d’un jockey anglais, il y a dix poètes pour le moins, à cette heure, de la force ou plutôt de la faiblesse de Leopardi, et dont on ne s’occupe pas, avec raison, du reste, mais par la seule raison qu’ils ne sont pas des Italiens !