Force et diffusion de la philosophie La défense est faible : on peut trouver aux philosophes bien des faiblesses, et leurs personnes comme leurs doctrines sont loin d’être inattaquables ; mais il suffit pour les grandir de les comparer à leurs adversaires. […] Il ne cesse de répéter que les passions qui sont en nous donnent la mesure de notre énergie morale, et que tout le secret de la vertu est de savoir utiliser, diriger, canaliser ces forces naturelles. […] Le Parlement n’avait guère plus de force conservatrice que l’épiscopat : le zèle aveugle de ses magistrats le discréditait sans sauver la religion ni la société ; les Gilbert de Voisins, les Omer de Fleury, les Séguier, toujours prêts à requérir contre les Lettres anglaises, l’Encyclopédie, le Bélisaire, l’Emile, comme contre l’inoculation, le jésuitisme et l’ultramontanisme, avilirent leur compagnie par le ridicule qui s’attache aux violences impuissantes ; ils décuplèrent la puissance des œuvres qu’ils faisaient brûler au pied du grand escalier de leur palais. […] Enfin toutes les forces qui devaient concourir à la défense de l’ordre religieux et politique étaient divisées : les Jansénistes tiraient sur les Jésuites, le Parlement faisait échec à la royauté ; dans ces discordes, il était rare que les philosophes n’eussent pas quelqu’un avec eux. […] On saisit dans sa méthode à la fois la force et la faiblesse de l’esprit du xviiie siècle, si exclusivement adonné à l’analyse.