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1101. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME ROLAND — I. » pp. 166-193

Les uns, les plus ardents, les plus avancés, à ce qu’ils affirment, la systématisent de plus en plus dans leurs appréciations ; ils vont à tout coordonner, hommes et choses, en d’orgueilleuses formules prétendues philosophiques et sociales, qui torturent, selon nous, la diversité des faits et qui leur imposent à toute force un sens sophistique, indépendant des misérables passions le plus souvent dominantes. […] Mme Roland est la première et la plus belle de ce groupe ; elle en est le génie dans sa force, dans sa pureté et sa grâce, la muse brillante et sévère dans toute la sainteté du martyre. […] Mme Roland, quinze jours avant sa mort, rétractait sans aucun doute ses anciennes âcretés contre La Fayette, en justifiant dans les termes suivants, Brissot, accusé par Amar de complicité avec le général : « Il avait partagé l’erreur de beaucoup de gens sur le compte de La Fayette ; ou plutôt il paraît que La Fayette, d’abord entraîné par des principes que son esprit adoptait, n’eut pas la force de caractère nécessaire pour les soutenir quand la lutte devint difficile, ou que peut-être, effrayé des suites d’un trop grand ascendant du peuple, il jugea prudent d’établir une sorte de balance. » Ces diverses suppositions sont évidemment des degrés par lesquels Mme Roland revient, redescend le plus doucement qu’elle peut de son injustice première. […] Le détail des champs, la couleur des vignes et des noyers, les sueurs des vignerons, la récolte, la basse-cour, les réserves de fruits secs, les poires tapées, l’occupent et la passionnent : « J’asine à force, » écrit-elle à Bosc dans une petite lettre richement et admirablement rustique, foisonnante pour ainsi dire83, qui aurait assez mal sonné, je crois, sous les ombrages majestueux de Coppet84, mais telle que notre pseudonyme George Sand en écrirait du fond de son Berry en ses meilleurs jours. […] Saturæ sordida rura casæ, dit Martial. « J’asine à force et m’occupe de tous les petits soins de la vie cochonne de la campagne. » (Lettre du 12 octobre 1785.)

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