Cependant l’esprit bourgeois, qu’on voyait poindre dès les temps épiques dans les gabs du Pèlerinage de Charlemagne, commence à se faire sentir par des contes ironiques ou plaisants, par des fabliaux, et par quelques branches de Renart : il s’épanouit au xiiie par la prodigieuse fécondité de ces deux genres, tandis que se déploie la noble et fine galanterie de la poésie lyrique de cour. […] Pendant la fin du xiie siècle, et une partie du xiiie , l’épopée de Renart fut remaniée, amplifiée, améliorée, gâtée par une foule de poètes, dont beaucoup étaient des clercs. […] Et la petite mésange elle-même se donne le malin plaisir de « faire la barbe » à maître Renart, en jouant au plus fin avec lui. […] De là la complaisance avec laquelle on nous détaille les dits et faits des fins compères, qui vivent d’industrie, et dont l’esprit est le seul capital : jongleurs, arracheurs de dents, voleurs sont toujours ici des personnages sympathiques. […] Dans la prolixité et la gaucherie de la plupart des fabliaux se fait sentir parfois une légèreté aisée, et les dialogues sont souvent remarquables de vivacité, d’énergie pittoresque et de fine convenance.