assez fâcheusement et abondamment de s’y introduire ; mais on s’y laisse moins prendre qu’ailleurs ; on l’y sent tout aussitôt sous les déguisements et les emprunts qu’il tente ; on le rejette avec dégoût, ou plutôt il va naturellement au fond ; et, tandis que, sous l’écorce de la prose, bien des talents équivoques en qualité surnagent, tandis qu’ils atteignent à une contrefaçon assez difficile à démêler, et qu’avec le travail, l’instruction, l’imitation de ce qu’on lit, la répétition assez bien débitée de ce qu’on entend, avec tous ces mérites surchargés, on parvient souvent à une sorte de compilation de fond ou de style, décente, et qui fait fort honnëte contenance, en poésie la qualité fondamentale se dénote aussitôt, la substance des esprits s’y fait toucher dans le plus fin de l’étoffe ; aussi très-peu suffit pour qu’on ait rang, sinon parmi les grands, du moins entre les délicats, et qu’on soit, comme tel, distingué de la muse, de cette muse intérieure qui console : ce qui, j’en conviens, n’empêche pas d’être parfaitement ignoré du vulgaire, comme disent les poëtes, c’est-à-dire du public. […] L’ironie est tout juste assez pour montrer combien ce converti, ce cœur dévot et tendre, sait le monde, combien il était remuable à ses moindres souffles ; et, s’il y a vengeance ou coquetterie à lui à faire connaître qu’il le sait si bien et que, s’il pardonne les malices, ce n’est pas qu’il les ignore, cette coquetterie, cette vengeance est bien fine et bien vite passée, et fait à la lecture un délicieux contraste avec l’onction qui d’ailleurs déborde. […] Guttinguer avait publié vers 1828, Amour et Opinion, les mœurs de l’époque impériale, celles de 1815, étaient déjà bien exprimées : élégie de fin d’Empire, écrite par un ex-garde d’honneur, où les personnages sont de beaux colonels et des généraux de vingt-neuf ans, de jeunes et belles comtesses de vingt-cinq ; où la scène se passe dans des châteaux, et le long des parcs bordés d’arbres de Judée et de Sainte-Lucie : en tout très-peu de Waterloo. — Mais Arthur est le vrai, le seul roman de M. […] Il y épanchait en paroles brisées et sans suite ses tristesses, ses défaillances, ses mélanges perpétuels et ses amalgames de religion, d’amour et de poésie, ses citations et réminiscences de Hugo, de De Vigny et d’autres encore : la femme, la Dalila y reparaissait jusqu’à la fin. […] dis, sous la fraîcheur du plus charmant ombrage, Dans tes loisirs sans fin, toujours et sans partage Suis-je en ton souvenir ?