a propos de casanova de seingalt Il ne faut pas avoir beaucoup vécu et observé, pour savoir que, s’il est de nobles êtres en qui le sentiment moral domine aisément et règle la conduite, il y a une classe assez nombreuse d’individus qui en sont presque entièrement dénués et chez qui cette absence à peu près complète permet à toutes les facultés brillantes, rapides, entreprenantes, de se développer sans mesure et sans scrupule. […] Sauf un petit nombre d’exceptions mystérieuses et de véritables monstruosités morales, l’homme est libre, bien que plus ou moins enclin ici ou là ; il peut lutter, bien qu’il lutte trop peu ; il peut149 s’appuyer sur certains principes qu’il sait bons et utiles, nouer alliance avec ses facultés louables contre ses penchants plus dangereux, bien que d’ordinaire ce soit pour ceux-ci qu’il se déclare. […] Ceux donc qui ont reçu en naissant la fermeté, la vénération, l’estime d’eux-mêmes, ces nobles et gouvernantes facultés, que la nature, à ce que pensent les phrénologistes, aurait placées au sommet du front comme un diadème moral, ceux-là agissent avec suite, se maintiennent purs dans les vissicitudes, et opposent aux déchaînements les plus contraires une auguste permanence. Un certain nombre, qui ne possèdent ces hautes facultés qu’inégalement ou selon une mesure assez moyenne, sont favorisés dans leur honorable ténacité, par le peu de tentation que leur donnent à droite ou à gauche les facultés mobiles et divertissantes, presque nulles chez eux.