Raillerie à part, d’ailleurs, sainte Térèse, qui n’est guère connue en France, comme nous venons de le dire, que pour deux ou trois mots sublimes, exprime l’amour avec une telle flamme qu’elle a vaincu, avec ces deux ou trois mots, l’ironie du peuple le moins romanesque de la terre, et elle a eu pour lui le charme du romanesque ! […] Voilà la marque distinctive et à part de ce talent qui n’est pas un talent, de ce génie qui n’est pas un génie, quoiqu’on lui donne ce nom pour l’exprimer, parce qu’il n’y a pas de nom au-dessus de ce nom. […] Quand sainte Térèse, dans sa Vie, nous rend compte de ses contemplations intérieures, qu’elle nous dresse une carte de mysticité comme pilote n’en dressa jamais des mers qu’il aurait parcourues, et où tout est marqué, même les plus imperceptibles écueils ; quand sa pensée va du recueillement à la quiétude, de la quiétude à l’extase, et de l’extase au ravissement, sainte Térèse s’exprime rarement par des images, et lorsqu’elle en a, c’est comme Dante : elle les tire des objets les plus familiers et les plus agrestes.