Supposons qu’il y ait en dehors de nous une certaine chose appelée matière, — ce qui peut être mis en doute ; — écartons l’idée de cette chose considérée dans son essence, laquelle nous est aussi inconnue que celle de l’âme ; prenons enfin l’idée de la matière telle que l’expérience nous la donne et telle qu’elle est représentée par les sens et par l’imagination, à savoir comme une pluralité de choses coexistant dans l’espace, quelles que soient d’ailleurs ces choses (atomes, phénomènes ou monades) ; — on peut affirmer qu’une telle pluralité, et en général toute pluralité, est hors d’état de se connaître intérieurement comme être, puisque cette pluralité n’a pas d’intérieur. […] En même temps que l’expérience intérieure nous donne l’unité du moi, l’expérience externe, aidée de l’induction, nous autorise à affirmer l’existence des autres hommes et par conséquent de consciences semblables à la nôtre.