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452. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre cinquième. Le réalisme. — Le trivialisme et les moyens d’y échapper. »

« L’idéal, a dit justement Amiel, ne doit pas se mettre tellement au-dessus du réel, qui, lui, a l’incomparable avantage d’exister. » L’artiste et le romancier doivent, comme le moraliste, tenir compte de cette parole. […] Tenez, voilà X. ; il ne verra pas si cette table est ronde ou carrée… Toute ma valeur, c’est que je suis un homme pour qui le monde visible existe. » — Fort bien, pour un commissaire priseur le monde visible existe aussi, et la tapisserie, et la table ronde ou carrée. […] S’il était possible de superposer un objet et la représentation que nous en donne l’art, pour voir s’ils sont parfaitement moulés l’un sur l’autre, on s’apercevrait qu’ils diffèrent toujours par quelque côté ; si l’objet et sa représentation étaient identiques mathématiquement conformes, l’art n’existerait pas Si d’autre part, ils étaient absolument dissemblables et impossibles à faire coïncider d’aucune manière, l’art aurait ment échoué. […] Le peintre, par exemple, se trouve devant deux grands problèmes : le dessin et la couleur : or le trait n’existe pas dans la réalité, la couleur y a des nuances insaisissables au pinceau. […] On n’a jamais relevé la note réaliste qui existe dans Paul et Virginie, mêlée à une poésie d’un souffle déjà romantique ; elle existe pourtant, et c’est cette note qui déplut surtout à M. de Buffon et au salon de Mme Necker.

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