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652. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME ROLAND — II. » pp. 195-213

Ce beau chef-d’œuvre terminé, ces messieurs se félicitent et s’applaudissent : je me sauve au jardin, j’y cueille la rose ou le persil ; je tourne dans la basse-cour où les couveuses m’intéressent et les poussins m’amusent ; je ramasse dans ma tête tout ce qui peut se dire en nouvelles, en histoires, pour ravigoter les imaginations engourdies, et détourner les conversations de chapitre qui m’endorment parfois : voilà ma vie. » Et un peu plus loin : « J’aime cette tranquillité qui n’est interrompue que par le chant des coqs ; il me semble que je palpe mon existence ; je sens un bien-être analogue à celui d’un arbre tiré de sa caisse et replanté en plein champ. » Dans tout ceci le style est autre, ou mieux il n’est plus question de style, il n’y a plus d’écolière ; elle cause : sa leçon de rhétorique est finie. […] Dans toute cette partie finale et déjà bien grave de la Correspondance, au milieu des vicissitudes domestiques et des malheurs qui assiégent l’existence de celle qui n’est déjà plus une jeune fille, il ressort pourtant une qualité qu’on ne saurait assez louer ; un je ne sais quoi de sain, de probe et de vaillant, émane de ces pages ; agir, avant tout, agir : « Il est très-vrai, aime-t-elle à le répéter, que le principe du bien réside uniquement dans cette activité précieuse qui nous arrache au néant et nous rend propres à tout. » De cet amour du travail qu’elle pratique, découlent pour elle estime, vertu, bonheur, toutes choses dans lesquelles elle a su vivre, et qui ne lui ont pas fait faute même à l’heure de mourir.

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