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429. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Le Chevalier de Méré ou De l’honnête homme au dix-septième siècle. »

On est tout étonné de le voir prendre sérieusement à partie Alexandre, et le morigéner en deux ou trois circonstances, comme civil et galant hors de propos ; il essaye tout aussitôt de se justifier de l’étrange idée : « Que si l’on m’allègue que c’étoit la bienséance de ce temps-là, ce n’est rien à dire ; les grâces d’un siècle sont celles de tous les temps. […] La première est longue ; mais, je ne sais si je m’abuse, elle me paraît charmante, et elle a semblé telle à de bons juges sur qui je l’ai essayée. […] J’étois bien triste, et je ne savois par où me consoler ; car de l’ôter de mon cœur, cela me sembloit impossible ; et, quoique le peu d’apparence de pouvoir passer ma vie auprès d’elle m’eût désespéré, je me plaisois trop à m’en souvenir pour essayer de l’oublier. […] Les écrits sortis de sa plume dans ses dernières années sont insipides ; il baisse à vue d’œil, il se rouille ; il parle de la Cour en bel-esprit redevenu provincial ; il a des ressouvenirs d’épicurien qu’il amalgame comme il peut avec des visées platoniques, et, dans son type d’honnête homme qui est sa marotte éternelle, après avoir épuisé la liste des anciens philosophes, il va jusqu’à essayer en quelques endroits d’y rattacher… qui ? […] Nous ressemblons tous à une suite de naufragés qui essaient de se sauver les uns les autres, pour périr eux-mêmes l’instant d’après.

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