Nous regarderons alors ses organes en exercice ; nous essayerons de découvrir de quelle façon elle recueille le pollen des fleurs, comment elle l’élabore, par quelle opération intérieure elle le change en cire ou en miel. […] Il n’y a pas encore de science des races1, et on se risque beaucoup quand on essaye de se figurer comment le sol et le climat peuvent les façonner. […] Épuiser l’indéfinité, l’infinité du détail dans la connaissance de tout le réel, c’est la haute, c’est la divine, c’est la folle ambition, et qu’on le veuille ou non c’est l’infinie faiblesse d’une méthode que je suis bien forcé de nommer de son nom scolaire la méthode discursive ; n’ayant point d’ailleurs à me présenter de sitôt devant le jury d’État constitué pour maintenir à l’agrégation de philosophie la pureté première des doctrines révolues, je puis traiter des méthodes intuitives et discursives, et les confronter, sans encourir, comme il advint récemment d’un jeune homme, les foudres universitaires ; de la certitude discursive et de la certitude intuitive ; la méthode intuitive passe en général pour surhumaine, orgueilleuse, mystérieuse, agnosticiste ; et l’on croit que la méthode discursive est humaine, modeste, claire et distincte, scientifique ; je démontrerai au contraire, un jour que nous essaierons d’éprouver plus profondément nos méthodes, qu’en histoire c’est la méthode discursive qui est surhumaine, orgueilleuse, mystérieuse, agnosticiste ; et que c’est la méthode intuitive qui est humaine, modeste, claire et distincte autant que nous le pouvons, scientifique. […] Qui répondra de demain ; comme dit ce gigantesque Hugo, si éternel toutes les fois qu’il n’essaie pas d’avoir une idée à lui : Non, si puissant qu’on soit, non, qu’on rie ou qu’on pleure Nul ne te fait parler, nul ne peut avant l’heure Ouvrir ta froide main, Ô fantôme muet, ô notre ombre, ô notre hôte, Spectre toujours masqué qui nous suit côte à côte, Et qu’on nomme demain !