Les sensations venues des organes internes et du corps entier ont une extensivité que l’école anglaise a excellemment décrite sous le nom de sensation volumineuse : qu’on vous jette un peu d’eau froide sur les mains, puis qu’on vous plonge tout entier dans l’eau froide, il y aura entre les deux sensations une différence d’intensité, mais l’une n’est-elle pas aussi plus volumineuse, plus massive que l’autre ? […] Sans cela, même en ayant déjà l’idée de l’espace, vous n’arriveriez jamais à distinguer les cas où c’est votre main seulement qui est affectée et ceux où c’est votre corps entier. […] Une observation attentive pendant trois semaines entières sur un aveugle-né avait persuadé à Platner qu’un homme privé de la vue ne perçoit que l’existence de quelque chose d’actif, différent de ses propres sentiments de passivité, et qu’en général il ne perçoit que la différence numérique des impressions ou des choses. « En fait, pour les aveugles-nés, le temps tient lieu d’espace. […] Quand il s’agit d’objets assez petits pour être tout entiers enserrés d’une main, les impressions cutanées de résistance se disposent automatiquement en forme sphérique ; il y a là une impression totale et finale sui generis, qui est celle de la solidité. […] Nous avons vu que toute impression éprouvée offre, dès le début, un caractère particulier tenant à sa relation particulière avec l’ensemble des impressions venues du corps entier : c’est virtuellement le signe local.