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266. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « II »

Certes, on pourrait citer tel point d’orgue inutile alanguissant une mordante fin de phrase, tel geste appris dans les conservatoires et venant troubler les développements d’une mimique naturelle ; mais l’ensemble est vivant, chaleureux, infiniment au-dessus de tout ce que nos théâtres nous ont depuis longtemps montré. […] Nous ne voulons ici que rappeler quelques-uns des procédés au moyen desquels le public, qui est presque tout dans notre théâtre, se trouve réduit, à Bayreuth, à un ensemble de quelques facultés désindividualisées15 et orientées vers la plus complète perception. […] L’ensemble de la scène paraît plus grand qu’il n’est en réalité. […] En même temps que l’ensemble grandit, chaque détail grandit, et d’autres illusions viennent s’ajouter à la première. […] Alors, les beautés se succèdent, selon la plus étonnante des progressions : le rêve d’Elsa, l’appel du héraut, deux fois répété dans un mortel silence de l’orchestre et des chœurs, l’invocation fervente de la vierge par tous abandonnée, l’apparition de la nacelle sur les méandres lointains du fleuve, la stupeur, l’allégresse de la foule, traduites en un double ensemble choral d’une animation prodigieusement réelle ; puis l’adieu au cygne, l’interdiction faite à Elsa par Lohengrin, l’ouverture du champ clos, le combat, la victoire.

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