À ce geste, à ces accents, à ces larmes, le barbier, croyant à un accès de démence de la jeune fille, laisse tomber son bassin rempli d’eau de savon dans la poitrine du père ; le père se lève, indigné d’être poursuivi jusque dans la mémoire de ses enfants par la poésie de son aversion, il s’emporte contre sa famille et proscrit plus sévèrement le livre de sa maison. […] Je l’élevai toute seule avec du lait et de l’eau, au point que c’était mon enfant ; dans mes bras, sur mes genoux, elle me souriait, jouait, grandissait. […] Tu fais passer en revue devant moi la foule de tout ce qui a vie ; tu m’apprends à reconnaître mes frères dans le buisson silencieux, dans l’air, dans les eaux ; et lorsque la tempête mugit et gronde dans la forêt, roulant les pins gigantesques, secouant avec fracas leurs branches et déracinant leurs souches ; lorsque le bruit de leur chute fait retentir de coups sourds l’écho des montagnes, alors tu me conduis dans l’asile paisible des grottes, et les merveilles de ma propre conscience se révèlent par la réflexion à moi ; et la lune pure et sereine monte à mes yeux, apaisant sous ses rayons toutes choses… « Oh ! […] Marguerite est allée, sa cruche à la main, chercher l’eau du ménage à la fontaine ; elle y rencontre une jeune fille du voisinage, jaseuse et médisante comme les commères désœuvrées des petites villes.