Cette erreur, c’est la méconnaissance d’un souverain principe de philosophie naturelle, qui nous avertit que plaisir et douleur, vertu et vice, sagesse et folie, justice et violence, généralement bien et mal, ne sont pas constitués d’éléments différents, mais des mêmes éléments, dont le premier terme exprime l’état de concordance et d’harmonie, le second, j’état d’inorganisation et de dérèglement. […] Après ces aveux qui offensent parce que façon glacée de se préparer une victime, on a besoin de penser aux douleurs et aux plaisirs des chevriers de Théocrite pour retrouver le sens de la saine nature, de l’Eros nu, beau et cruel. […] » Cette fée, cet esprit de poétesse et d’enfant, Chateaubriand en avait li côté de lui la vivante image dans sa sœur Lucile, génie femme, plus doux et plus grec que le sien, qui au fardeau de trop de douleurs subies ajoutait une faculté passionnée d’imaginer la douleur : sa raison se voila, elle en porta le trouble comme une grâce touchante, il semblait qu’il eût rendu son âme entière inspirée. […] Si la blessée entend dans sa solitude que le volage en est à tracer autour d’une autre le cercle magique, il accourt un instant flatter ses larmes ; mourante, il se « consacre à ses douleurs » et à ses funérailles. […] On voudrait ici en rappeler la beauté, répéter avec les temps les plus illustres du genre humain, que l’amour n’est pas la seule direction des enthousiasmes virils, ni la sensibilité aux joies et aux douleurs des individus, la plus noble espèce de sensibilité.