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1490. (1890) Nouvelles questions de critique

Et si l’on ne dit pas précisément que Michel-Ange ait peint la chapelle Sixtine ou que Dante ait composé sa Divine Comédie pour transmettre aux âges futurs un document certain sur la psychologie des hommes de la Renaissance ou du Moyen âge, on incline sans doute à le croire, on le dira prochainement ; — et en attendant, Michel-Ange et Dante, on les traite, pour ne pas dire que l’on s’en sert, exactement comme si l’on le pensait. […] Et ce n’est pas assez de dire qu’à ce point de vue, la Chansons de Roland vaut l’Iliade ou la Divine Comédie, mais on doit dire qu’elle vaut davantage. […] Pellissier dit encore : « Il a ce secret du nombre et du rythme qui s’était perdu dans la langue du vers depuis le divin Racine, et que notre prose avait toujours ignoré. » Voilà, je crois, passer la mesure ; et, sans rien dire ici de Bossuet ni de Pascal, sans reparler de Rousseau, je ne trouve pas que le nombre ou le rythme ait manqué, par exemple, à Massillon et à Fléchier, rhéteurs illustres, eux aussi, et dont Chateaubriand, n’en faisons aucun doute, à beaucoup pratiqué le premier. […] Tels furent, si je ne me trompe, les artistes du moyen âge, avec leur mépris absolu de la beauté ; tel est Dante lui-même, en quelques endroits au moins de la Divine comédie, où il a exprimé l’impalpable, l’impondérable, et l’inexistant ; tel est peut-être Fra Angelico… Mais ici je craindrais, en entrant après eux dans la région du mystère et de l’ombre, je craindrais de m’y perdre, et il me suffira d’une remarque.

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