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324. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre septième. »

Le discours de l’imprimeur n’en est pas la plaisanterie la moins piquante. […] L’idée était fort heureuse d’imaginer une réunion des principaux personnages des états, et de leur faire tenir des discours où ils se trahissent eux-mêmes, et dévoilent leurs motifs intéressés et ceux de leurs amis. […] Qui n’a rien à prouver, sinon que rien ne se peut prouver, ne pense guère à ranger ni à presser son discours. […] Les épithètes accablent le discours, rien n’étant présenté sous une face principale qui lui donne une valeur déterminée. […] Je reconnais encore le grand écrivain de tous les temps dans cette critique de certains auteurs de son siècle : « Pourveu, dit-il, qu’ils se gorgiassent en la nouvelleté, il ne leur chault de l’efficace ; pour saisir un nouveau mot, ils quittent l’ordinaire, souvent plus fort et plus nerveux168. » Mais voici qui est de l’écrivain du xvie  siècle « Le langage françois n’est pas maniant et vigoureux suffisamment ; il succombe ordinairement à une puissante conception ; si vous allez tendu, vous sentez souvent qu’il languit soubs vous et fleschit ; et qu’à son default le latin se presente au secours, et le grec à d’aultres. » Cette crainte d’en dire trop peu dans le discours, de laisser quelque chose de reste, et que ce reste soit le plus important, est bien d’un siècle plus affamé de connaissances que de vérité.

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