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903. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 juin 1885. »

Car l’époque, nécessaire, de la synthèse est venue, l’heure où se devait instituer l’œuvre d’art complète, à la fois rationnelle et sensationnelle, fondant, sous une formule dernière, les réalismes de Racine et de Hugo, — et c’est l’époque de Richard Wagner. […] Alors, profitant de l’agitation qu’avait instituée en Allemagne ses concerts, les représentations de ses dernières œuvres, ses manifestes, et la fondation des premiers cercles Wagnériens (les Wagner-Vereine), il émit une souscription publique de mille actions, à trois cents thalers (1125 francs) chaque, pour la construction d’un Théâtre de Fête à Bayreuth, et la représentation, en ce Théâtre, de l’Anneau du Nibelung, pièce de fête scénique pour trois journées et une veille. […] Que l’on se rappelle les mélodies d’Opéra italiennes, faites au siècle dernier, et que l’on reconnaisse la prodigieuse et vaine nullité de cette dépense de sons, uniquement asservie à la Mode et à ses exigences. […] En réalité, ce progrès musical extraordinaire ressemble au brusque réveil d’un rêve ; et nous éprouvons, aussitôt, le bienfaisant effet de ce réveil sur l’âme que le rêve avait, au dernier point, angoissée ; car jamais, auparavant, le musicien n’avait laissé vivre devant nous la torture du monde, si tristement infinie ; aussi fut-ce, en vérité, par un élan désespéré que le Maître, divinement pur et tout rempli de son enchantement, est entré dans ce nouveau monde de lumière, dont le sol lui a présenté aussitôt, superbement épanouie, cette mélodie longtemps cherchée, cette mélodie humaine, délicieusement douce, purement innocente. […] N’oublions pas de citer les traducteurs français à qui l’on est redevable en partie de la réussite du dernier concert populaire.

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