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42. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Essai de critique naturelle, par M. Émile Deschanel. »

Jeune, il avait entrevu Mme de Staël ; il avait vu, dans son séjour à Francfort, nos voyageurs philosophes qui allaient à la recherche d’idées à travers l’Allemagne12 ; il lisait tous les livres imprimés ici, et, dans les tout derniers temps de sa vie, il en lut un de M.  […] Or, en mourant, en redevenant de plus en plus un chrétien fidèle et contrit à ses dernières heures, en offrant à Dieu le sacrifice de tout, il eut pourtant un dernier regret, une tentation suprême, et cette tentation, comme il l’appelait en effet, est d’un ordre trop élevé et trop épuré, d’une qualité trop subtile, elle fait trop d’honneur et à lui et à notre littérature en particulier, pour ne pas être connue et racontée, si singulière qu’elle nous puisse paraître. Un des dignes amis, témoins de ses derniers instants, écrivait à un autre ami peu de jours après sa mort : « Je ne sais si vous avez connaissance d’un fait bien remarquable qui a empreint d’un sceau de douleur l’un des derniers jours que Manuel a passés en ce monde. […] Villemain a publiés l’année dernière (les volumes contenant le Tableau du XVIIIe siècle) ; il les dévora, et cette lecture fit sur lui un effet extraordinaire. […] Épicurisme du goût, à jamais perdu, je le crains, interdit désormais du moins à tout critique, religion dernière de ceux même qui n’avaient plus que celle-là, dernier honneur et dernière vertu des Hamilton et des Pétrone, comme je te comprends, comme je te regrette, même en te combattant, même en t’abjurant16 !

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