Quant à la personne même qui les a écrites, Saint-Simon, si sévère, si injuste pour l’illustre maréchal, son fils, a tracé d’elle, dans sa vieillesse, un portrait unique : « Cette marquise, nous dit-il, était une bonne petite femme sèche, vive, méchante comme un serpent, de l’esprit comme un démon, d’excellente compagnie, qui avait passé sa vie jusqu’au dernier bout dans les meilleures et les plus choisies de la Cour et du grand monde, et qui conseillait toujours « son fils de ne point donner de scènes au monde sur sa femme, de se vanter au roi tant qu’il pourrait, mais de jamais ne parler de soi à personne. […] Don Juan, bâtard reconnu du dernier roi, soutenu des vœux de la noblesse, lutta contre l’un et l’autre de ces favoris et contre la reine mère, au mauvais gouvernement desquels on imputait tous les maux de l’État et les désastres de la monarchie dans les guerres avec la France. […] Son corps fut porté à l’Escurial, dans la sépulture des Princes à côté du Panthéon. » On le traitait jusqu’au bout en fils de roi, bien qu’il y eût fort à dire sur l’authenticité et la légitimité de cette bâtardise ; mais Philippe IV l’avait reconnu — Le marquis de Villars a tracé de lui le portrait suivant, qui, dans un ton simple, est d’une belle langue : « Sa naissance lui avait donné un grand rang et de grands emplois, mais on ne vit point la suite de sa vie répondre à cette éducation : on le vit malheureux dans la plupart de ses entreprises, souvent battu à la guerre, toujours éloigné de la Cour ; son dernier malheur fut d’être devenu enfin la première personne de l’État.