Un seul détail pour montrer l’étendue des grâces : j’ai compté quatre-vingt-trois abbayes d’hommes possédées par des aumôniers, chapelains, précepteurs ou lecteurs du roi, de la reine, des princes et princesses ; l’un d’eux, l’abbé de Vermond, a 80 000 livres de rente en bénéfices. […] Sous la direction du Conseil du roi, trois fonctionnaires superposés, au centre le contrôleur général, dans chaque généralité l’intendant, dans chaque élection le subdélégué, mènent toutes les affaires, fixent, répartissent et lèvent l’impôt et la milice, tracent et font exécuter les routes, emploient la maréchaussée, distribuent les secours, réglementent la culture, imposent aux paroisses leur tutelle, et traitent comme des valets les magistrats municipaux. « Un village, dit Turgot127, n’est qu’un assemblage de maisons, de cabanes et d’habitants aussi passifs qu’elles… Votre Majesté est obligée de décider tout par elle-même ou par ses mandataires… Chacun attend vos ordres spéciaux, pour contribuer au bien public, pour respecter les droits d’autrui, quelquefois même pour user des siens propres. » Par suite, ajoute Necker, « c’est du fond des bureaux que la France est gouvernée… Les commis, ravis de leur influence, ne manquent jamais de persuader au ministre qu’il ne peut se détacher de commander un seul détail ». — Bureaucratie au centre, arbitraire, exceptions et faveurs partout, tel est le résumé du système […] En attendant, marquons deux ou trois détails. […] — Mme Campan, Mémoires, I, 237 (détails à l’appui).