Les Anglais ont assez bien traduit quelques tragédies de Racine ; je doute qu’ils traduisissent avec le même succès les fables de La Fontaine, l’ouvrage peut-être le plus original que la langue française ait produit ; l’Aminte, pastorale pleine de ces détails de galanterie, et de ces riens agréables que la langue italienne est si propre à rendre, et qu’il faut lui laisser ; enfin les Lettres de madame de Sévigné, si frivoles pour le fond, et si séduisantes par la négligence même du style. […] Pourquoi enfin transplanter dans une langue ce qui n’a de grâces que dans une autre, comme les détails de l’agriculture et de la vie pastorale, si agréables dans Virgile et si insipides dans toutes les traductions en prose qu’on en a faites ? […] Aussi rien n’est peut-être plus rare en littérature, qu’une traduction généralement approuvée ; le fût-elle même dans son ensemble, combien les détails ne prêteraient-ils pas à la critique ?