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603. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. Ernest Renan »

J’ai voulu une fois dans ma vie dire ce que je pense d’une race que je crois bonne, quoique je la sache capable, quand on exploite sa droiture, de commettre bien des naïvetés. […] Vous croyez tenir sa pensée, sa formule définitive, vous vous en emparez soit pour l’adopter, soit pour la combattre. ; prenez garde, il va vous la reprendre, la traduire de nouveau, y introduire précisément ce que vous n’y aviez pas vu. […] Ici c’est le critique seul et le curieux des origines qui a l’air de s’insurger contre la rhétorique, fût-elle de l’étoffe la plus éclatante ; mais n’allez pas croire pourtant que ces notes que M.  […] Livet, il cherche et trouve des raisons subtiles et profondes à une institution et à une durée mémorable dont il ne me convient pas assurément de vouloir amoindrir le prestige ; mais il semble croire qu’il en est de l’Académie comme de Rome, qu’elle est vouée à l’éternité ; « Qu’on essaye, dit-il, de se figurer un pouvoir, quelque autorisé à tout faire qu’on le suppose, qui ose porter atteinte à ce chiffre de quarante, devenu sacramentel en littérature ; on n’y réussira pas. » Grâce à Dieu, l’Académie n’est pas et n’a jamais été bien menacée de nos jours ; mais pour cela je ne crois pas que ce chiffre de quarante ait une telle vertu historique. […] C’est sa voie directe en effet, c’est sa vocation principale ; il ne se croit pas libre en conscience de l’éluder ; il s’obstine à cet enseignement, à ce but de toute sa vie scientifique, comme à un devoir.

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