Le Romantisme, ce Résurrectionniste, en ravivant, aux lueurs de son flambeau, toutes les gloires du seizième siècle, de ce siècle que le dix-septième et le dix-huitième, descendants ingrats de pères plus grands qu’eux, avaient cru pouvoir effacer, le Romantisme avait laissé dans l’ombre cette petite gloire d’une traduction qui est un bijou… Tous ou presque tous de ce siècle qui a la beauté d’une aurore, depuis Rabelais, Montaigne, Ronsard, d’Aubigné, Régnier, Amyot, Desportes, jusqu’à Mathieu, le splendide Pierre Mathieu, qui écrivait sous Henri IV et qui précéda immédiatement cette littérature, exécutée comme la Noblesse et dont Malherbe et Despréaux vont tout à l’heure être les Richelieu et les Louis XIV, tous avaient eu leur édition ou du moins leur page d’histoire ou de critique qui disait la nécessité ou la convenance de l’édition, comme on a la niche, en attendant la statue. […] » Hérodote a sur son front païen quelque chose du rayon des prophètes, et Pierre Saliat a le mérite critique de l’avoir vu… Il a, comme un de nous, raffinés modernes qui cherchons partout des analogies, saisi ce caractère majestueux, théocratique et patriarcal qui donne à Hérodote un si grand air, auprès duquel Thucydide lui-même semble petit et mince, un maigre historien d’époque philosophique, quelque chose comme un Thiers d’Athènes. […] Dans ce temps de critique pointilleuse où l’histoire, cette riche draperie, s’effiloche sous le travail des ronge-mailles qui fendent en quatre chaque fil dont elle est faite, ce sera une originalité et un contraste qui auront leur ragoût, que cette vieille et toujours jeune histoire d’Hérodote contrastant, par le respect des traditions et le sentiment des choses divines, avec nos histoires contemporaines, qui mettent Dieu sous la remise et qui sont, elles, si jeunes et cependant si vieilles déjà !