Je crois bien qu’il a, lui aussi, la préoccupation de diminuer (mais en tant que de raison) les fautes et les crimes de cette époque comme il a diminué le poids horrible qui écrase la mémoire du Régent quand il a détruit, par une discussion sévèrement menée, ces accusations épouvantables d’empoisonnement et d’inceste que La Grange-Chancel ne craignit pas d’articuler. […] S’il en avait eu, aurait-il demandé sa grâce au Régent dans des vers que de Lescure a publiés à la fin de son volume, et, la grâce obtenue, se serait-il relevé d’à genoux, à la mort du Régent, pour frapper d’une dernière Philippique la mémoire de l’homme qu’il ne craignait plus et qui lui avait pardonné ? […] De même, il y a des esprits héroïques aussi à leur manière, qui ne craignent pas de dire nettement la vérité qui offense, de lever le fouet sur les lâches, les coquins, les infâmes ou les sots de leur temps, et ces esprits-là ne prendront pas pour eux la leçon à côté que leur donne de Lescure, en leur montrant les malheurs de La Grange-Chancel, qui ne fut pas, d’ailleurs, si malheureux, car pour faire ce service public de la satire qu’ont toujours respecté les hommes, il faut de rigueur du talent et de la conscience, et La Grange-Chancel n’en avait pas. […] Dans le jugement final qu’il n’a pas craint de prononcer sur le mérite du poète des Philippiques, de Lescure (il faut bien le lui dire) n’a plus la justesse du coup d’œil qu’il a montrée quand il s’est agi du Régent empoisonneur et incestueux, et qu’il a assaini cette triste et coupable mémoire, impossible à purifier sur tant d’autres points.