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455. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Duclos. — I. » pp. 204-223

Plongé en plein dans le monde licencieux de Paris, il se livrait à toutes les liaisons et à toutes les rencontres ; considérant, après coup, les dangers qu’il y avait courus, il remercie la Providence de l’avoir conduit encore si bien, et de l’avoir soutenu à travers les précipices et quelquefois les bourbiers. […] Un jour que Boindin, très raisonnable dans le tête-à-tête, mais paradoxal en public, en était venu, dans je ne sais quelle discussion, à soutenir comme vraisemblable la pluralité des dieux, Duclos tout d’un coup se mit à rire, et comme Boindin, lancé en pleine éloquence, lui en demandait la raison, Duclos pour toute réponse lui dit que c’était qu’en soutenant cette pluralité des dieux, il lui avait rappelé l’avare qui est plus prodigue qu’un autre quand une fois il se met en frais : « Il n’est chère que de vilain ». […] Si j’osais faire cette comparaison, je dirais qu’il y avait dans Duclos, tant pour les inconséquences honorables que pour la verdeur et le coup de dent, quelque chose de Gui Patin : un Gui Patin moins honnête, éclairé et corrompu par la vie de la société, tenant bon toutefois sur certains points et ne se laissant pas entamer. […] Le poète Le Brun, comme s’il y avait vu après coup une personnalité, y a répondu par l’épigramme suivante : Bel esprit fin, mais non sans tyrannie, Pour se venger de n’être que cela, Duclos disait : Bête comme un génie.

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