Et nous voilà, avec Daudet, dans la loge de Sisos essayant ses robes, en compagnie de Doucet, ce couturier, délicat et intelligent collectionneur ; dans la loge de Cerny, dévêtant son svelte, et fantaisiste costume de petit mitron ; dans la loge de Mounet, tapissée de lambeaux d’affiches en pourriture, avec un étal sur une planche de pots pour le maquillage de l’artiste, semblable à l’appareillage de couleurs d’un peintre à la colle. […] Sur ce ciel, les grands arbres noirs, non feuillés encore, mais à la ramure infinie en éventail, et pareils à ces fougères gigantesques du monde antédiluvien, qu’on découvre calcinées au fond des mines ; et sous cette obscurité toute cloutée de feu, des souffles énormes balançant, et faisant gémir ces arbres couleur de charbon, comme les arbres d’une planète autre que la terre, d’une planète en deuil. […] Tout en disant : « Quand on n’est plus jeune, il faut se faire des occupations qui vous tiennent compagnie », elle se lève d’un petit bureau, qui est comme une jardinière de glaïeuls naturels, en dedans desquels se pressent et se tassent des sébiles et des soucoupes, pleines de couleurs, pleines de pétales artificiels non encore colorés ; elle se lève pour me montrer un imperceptible « Jugement de Pâris » ; un pastel de la Lecouvreur, qui a bien certainement la touche des pastels de Coypel, et pourrait bien être l’original ou une répétition de la peinture à l’huile ; un collier de perles, aux perles usées, qui viendrait de la femme du duc de La Rochefoucauld, l’auteur des Maximes.