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9. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre troisième. La connaissance de l’esprit — Chapitre premier. La connaissance de l’esprit » pp. 199-245

Mais, en disant cela, je ne fais qu’affirmer la permanence de quelque chose en eux et en moi ; je ne dis pas ce qu’est ce quelque chose ; je pose sa durée, non sa qualité ; la question est réservée encore. — Ce que nous affirmons en troisième lieu, c’est que ce quelque chose est lié à tel corps organisé ; j’ai le mien, Pierre et Paul ont chacun le leur ; et nous voulons dire par là que, en règle générale, certains changements de mon corps provoquent directement en moi telles sensations, et que certains événements en moi, émotions, voûtions, provoquent directement dans mon corps tels changements ; même règle pour Pierre, Paul et leurs corps. […] Je suis donc une série d’événements et d’états successifs, sensations, images, idées, perceptions, souvenirs, prévisions, émotions, désirs, volitions, liés entre eux, provoqués par certains changements de mon corps et des autres corps, et provoquant certains changements de mon corps et des autres corps. […] C’est donc parce que les autres, celles de contact, de pression, de température, d’effort musculaire, de douleur locale, de saveur et d’odeur, ne sont point projetées hors de notre corps, qu’elles ne nous sont point aliénées ; leur emplacement est la cause de leur attribution ; nous nous les rapportons, parce que notre corps, comparé aux autres, a des caractères singuliers et propres. — En effet, c’est par son entremise que nous, percevons les autres corps et que nous agissons sur eux. […] Parmi les innombrables corps qui nous entourent, il y en a plusieurs qui, de près ou de loin, ressemblent au nôtre. […] Je prévois, avant de les constater, les changements que telle modification de tel corps ordinaire provoquera dans tel autre corps ordinaire, et, cent mille fois contre une, ces changements naissent tels que je les ai prévus.

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