Quand Tannhaüser se prépare à lui répondre, on saisit dans l’orchestre les premières notes du motif voluptueux tiré de l’ouverture, qui rhythmait la danse des Bacchantes, alors que tout en demandant à Vénus « la Liberté », il lui promettait de continuer à célébrer ses charmes. […] J’ai voulu montrer naguère, ici même, que l’œuvre salutaire de Wagner pouvait être poursuivie : que le Maître, après avoir, à jamais, concilié les trois grandes formes artistiques, nous avait encore laissé un principe large et sûr, par lequel nous pouvions concilier les deux tendances opposées de la peinture : que les peintres, sans cesser être artistes, et en gardant à leur art la même destination théorique, pouvaient continuer Franz Hals ou Léonard de Vinci, reproduire exactement leurs visions, ou dédaigner toute réalité de vision afin de reproduire exactement leurs émotions. […] La littérature latine suivit un développement pareil à celui des lettres grecques, moins littéraire seulement, jusque le jour où la Grèce imposa aux Romains le désir de continuer son art. […] Et c’est, aux actes I, IV et V, la merveille d’une musique radieuse, adaptée au sujet, presque continue : c’est la solennelle majesté d’un rite sacré, où bruissent les révoltes de quelque luxurieuse passion ; c’est l’émotion douloureuse d’une lutte entre la science et les épouvantables désirs des ors ; c’est un chant d’amour si fervide et cruel, que le cœur halète, abîmé, sous l’afflux des perverses harmonies. […] L’artiste devra limiter la durée de la vie qu’il voudra construire, Il pourra ainsi, durant les quelques heures de cette vie, restituer tout le détail et tout l’enchaînement des idées, On n’aura plus des perceptions isolées, inexpliquées, mais la génération même, continue, des états mentaux.