/ 3655
626. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Sainte Térèse » pp. 53-71

nous sommes trop catholique, nous connaissons trop le respect qu’on doit à une sainte dont les pieds transfigurés posent actuellement sur nos autels, pour risquer une opposition inconvenante entre la grande mystique de l’Espagne et cette nonne d’un comte Ory impossible, introduite au xviie  siècle dans la légende dorée du scandale. […] En France, où l’on a assez d’esprit pour se permettre l’ignorance, on parle quelquefois de sainte Térèse, mais on ne la connaît pas, et les idées qu’on se fait de cet ange de la spiritualité sont assez confuses. […] Quel critique enfin a signalé au public, d’une façon quelconque, l’existence d’une traduction qui met à sa portée une œuvre littéraire comptée au premier rang dans la littérature espagnole, et qui, de plus, lui fait connaître une de ces prodigieuses individualités, comme on dit maintenant, d’autant plus curieuse qu’elle est inexplicable à la sagacité purement humaine de l’Histoire, mais dont, pour cette raison peut-être, l’Histoire aime peu à s’occuper. […] Raillerie à part, d’ailleurs, sainte Térèse, qui n’est guère connue en France, comme nous venons de le dire, que pour deux ou trois mots sublimes, exprime l’amour avec une telle flamme qu’elle a vaincu, avec ces deux ou trois mots, l’ironie du peuple le moins romanesque de la terre, et elle a eu pour lui le charme du romanesque ! […] Sainte Térèse, grâce à cette traduction de ses œuvres complètes, peut être maintenant aussi profondément connue du public français que jusqu’ici elle l’était peu ; et nous désirons qu’elle le soit.

/ 3655