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717. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Correspondance de Béranger, recueillie par M. Paul Boiteau. »

Je n’oublierai pas un point capital : Béranger est mort en communion parfaite avec le régime impérial qu’il n’avait pas appelé, mais qu’il avait certainement préparé ; il n’y porta point d’enthousiasme, mais il eut le bon sens de comprendre où était le salut de la France, et que, de plus, il lui serait ridicule, à lui qui avait tant fait pour entretenir par sesrefrains le culte de Napoléon, de n’en pas accepter les conséquences. […] La chanson était la distraction légère et le hors-d’œuvre sur lequel il ne comptait pas, et il fondait tout son espoir de renommée sur un poëme (je ne sais quel poëme épique pastoral) qu’il corrigeait et retravaillait sans cesse : « Si l’amour-propre ne m’égare pas, je crois commencer un peu à comprendre ce que c’est que la poésie ; mais qu’il y a encore à apprendre !  […] Son rare bon sens fut de comprendre nettement que, dès cette heure, son rôle de guerre était fini, que « Charles X et la Chanson étaient détrônés du même coup » ; sa probité fut de désarmer tout de bon, et sa force, de tenir ferme dans cette neutralité honorable. […] Peut-être qu’à la fin un peu de pudeur le fera comprendre aux plus sourds. » Il lui donne toutes sortes de bons conseils pour la pratique de la vie, d’abord de ne plus faire de lettres de change, ce qui donne prise sur lui ; et puis de calmer son imagination, car le pauvre poëte fourvoyé était plein de chimères.

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