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29. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre quatrième. Les conditions physiques des événements moraux — Chapitre III. La personne humaine et l’individu physiologique » pp. 337-356

Donc, en tant que composé de forces et de pouvoirs, le moi n’est lui-même qu’une entité verbale et un fantôme métaphysique. […] À ce titre, le moi est un être aussi bien que tel corps chimique, ou tel atome matériel ; seulement c’est un être plus composé, partant soumis à des conditions de naissance et de conservation plus nombreuses. […] Comme on l’a montré, cette trame peut être considérée à deux points de vue, soit directement, en elle-même et par la conscience, soit indirectement, par la perception extérieure et d’après les impressions qu’elle produit sur nos sens. — À côté des idées, images et sensations, événements fort composés dont nous avons conscience et que cette particularité distingue des autres événements analogues, sont d’autres événements rudimentaires et élémentaires du même genre, dont nous n’avons pas conscience, et que dénote l’action réflexe : tel est le premier point de vue. — À côté des mouvements moléculaires fort composés qui se passent dans la substance grise des lobes cérébraux et des centres dits sensitifs, sont d’autres mouvements moléculaires analogues et moins composés qui se passent dans la substance grise de la moelle et dans les ganglions du système nerveux sympathique170 ; tel est le second point de vue. — Le premier est le point de vue psychologique ; le second est le point de vue physiologique. — D’après le second, il y a dans l’animal plusieurs centres d’action nerveuse, les ganglions du grand sympathique, les divers segments de la moelle, les divers départements de l’encéphale, plus ou moins subordonnés ou dominateurs, plus ou moins simples ou compliqués, mais tous distincts, mutuellement excitables, et doués des mêmes propriétés fondamentales. — D’après le premier, il y a dans l’animal plusieurs groupes d’événements moraux, idées, images, sensations proprement dites, sensations rudimentaires et élémentaires, tous plus ou moins subordonnés ou dominateurs, plus ou moins simples ou compliqués, mais tous distincts, mutuellement excitables, et plus ou moins voisins de la sensation. — En forçant les termes, on pourrait considérer la moelle comme une file d’encéphales rudimentaires, et les ganglions du système sympathique comme un réseau d’encéphales plus rudimentaires encore171. […] Or il n’y a point de différence entre un système nerveux ainsi composé et le système nerveux d’un mammifère, sinon que les segments du premier sont plus complets et plus indépendants que ceux du second. En effet, l’anatomie montre qu’une colonne vertébrale, comme un annelé, est composée de segments protecteurs et de segments médullaires distincts, que le crâne lui-même est composé de vertèbres élargies et soudées, et que le cerveau n’est qu’un prolongement et un développement de la moelle.

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