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477. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres de Frédéric-le-Grand Correspondance avec le prince Henri — II » pp. 375-394

J’ai pris sur moi de le dissiper le plus qu’il m’a été possible, en me livrant à des occupations de devoir et de nécessité ; mais, mon cher frère, il est bien difficile d’effacer les profondes impressions du cœur. Mon enfant m’a volé le cœur par un nombre de bonnes qualités qui n’étaient contrebalancées par aucun défaut. Je me complaisais dans les espérances qu’il me donnait ; il avait la sagesse d’un homme formé, avec le feu de son âge ; il avait le cœur noble et plein d’émulation, se poussant à tout de lui-même, apprenant ce qu’il ne savait pas avec passion. […] Si je pense avec cela que cet enfant avait le meilleur cœur du monde, qu’il était né bienfaisant, qu’il avait de l’amitié pour moi, alors, mon cher frère, les larmes me tombent des yeux malgré moi, et je ne saurais m’empêcher de déplorer la perte de l’État et la mienne propre. […] Persuadé de l’amitié que vous avez pour moi, je vous ai ouvert mon cœur sur ce sujet, qui a été longtemps l’objet de mes réflexions.

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