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1917. (1905) Pour qu’on lise Platon pp. 1-398

Ensuite, quiconque le voudra l’accusera de corrompre les jeunes gens, en leur persuadant de pratiquer l’art du pilote et l’art du médecin sans se soucier des lois écrites et de diriger, comme il lui plaît, vaisseaux et malades et le citera devant qui de droit, c’est-à-dire devant un tribunal. […] Platon déteste les poètes, et il est poète lui-même, et d’ailleurs tellement amoureux de poésie qu’il cite sans cesse les poètes, beaucoup plus que ne font à l’ordinaire les écrivains grecs, du moins de son temps. […] Pour ne citer qu’un seul exemple, tel pur psychologue positiviste fait appel à chaque instant à l’inconscient, et s’il y a quelque chose d’inconnaissable par définition, c’est probablement l’inconscient, et voilà une psychologie positiviste s’appuyant sur un fondement métaphysique, par ce seul fait que nous-mêmes, en tout ce que nous sommes, nous flottons sur la métaphysique comme un bouchon sur l’océan, et que nous ne pouvons pas réfléchir seulement sur nous-mêmes sans percevoir tout proche l’immense abîme mouvant, obscur et insondable. […] Quelques homérides nous citent deux vers de leur poète qu’ils ont conservés : “Les mortels le nomment Éros, le dieu ailé ; les immortels l’appellent Étéros, le dieu qui donne des ailes.” » L’amour n’est qu’un souvenir de l’éternelle beauté contemplée jadis, réveillé par la rencontre d’une beauté d’ici-bas et à qui l’émotion de cette rencontre donne des ailes pour s’élever de nouveau à la contemplation du Beau éternel.

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