Et le monde l’y aide ; les circonstances rencontrées achèvent la révolution naturelle ; le goût change par sa propre pente, mais aussi par l’ascendant de la cour. […] Qu’Alceste soit bourru et maladroit, cela est vrai d’abord, car nos plus vaillantes vertus ne sont que les heurts d’un tempérament mal ajusté aux circonstances ; mais par surcroît cela sera agréable. […] Son grand talent est le savoir-vivre ; ce n’est pas seulement dans les petites formalités de la vie courante qu’il le porte, c’est dans les circonstances violentes, au fort des pires embarras. […] Il prend dès l’abord le ton des circonstances ; il sent du premier coup ce qu’il faut dire ou taire, dans quelle mesure et avec quelles nuances, quel biais précis accommodera la vérité et la mode, jusqu’où il faut transiger ou résister, quelle fine limite sépare les bienséances et la flatterie, la véracité et la maladresse. […] On eut une cour, des salons, une conversation, la vie mondaine, le goût des lettres, l’exemple de la France, la paix, le loisir, le voisinage des sciences, de la politique, de la théologie, bref toutes les circonstances heureuses qui peuvent élever l’esprit et civiliser les mœurs.