Ainsi on m’écrit de Nice, et je regrette de ne pouvoir vous donner toute la lettre, curieuse et charmante : telle prose n’est pas que le sens ; elle est chargée d’autre chose ; au-delà des mots et des activités de surface, elle éveille les prolongements ineffables de la poésie pure… je suis bien de cet avis, et je croyais l’avoir dit expressément dans le passage du discours où je distingue, d’ailleurs trop sommairement, deux musiques dans la prose : la musique Balzac, D’Ablancourt, Bouhours ; la musique Rabelais, Rousseau, Chateaubriand ; la première, « nouée » au sens immédiat qu’elle a pour objet ou de souligner ou même de compléter : la seconde, dépassant le sens et établissant un contact profond, de toute l’âme à toute l’âme, entre l’écrivain et nous. […] Relisez là-dessus un des manifestes symbolistes, le livre de Robert de Souza, sur la poésie populaire et le lyrisme sentimental. lisez de même le livre charmant de Mlle Simone Téry- l’ile des bardes (Flammarion) — sur la renaissance poétique de l’Irlande contemporaine ; l’Irlande, où tout le monde est poète, même et surtout les paysans.