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1414. (1774) Correspondance générale

Je la décroche de la muraille où elle était restée suspendue ; et la tête nue, la poitrine découverte, comme c’est mon usage, je me sens entraîné à chanter ; Vous, qui de la Divinité Nous montrez sur le trône une image fidèle ; Vous, qui partagez avec elle Le plaisir, par les rois si rarement goûté, De consacrer l’autorité, Sans cesse formidable et quelquefois cruelle, Au bonheur de l’humanité ; Souffrez qu’aujourd’hui je révèle, Entre tant de vertu, cette unique bonté Qui seule aurait suffi pour vous rendre immortelle. […] Une certaine Mme de Borosdin, qui chante avec beaucoup de goût et une très-jolie voix, m’a promis quelques airs nationaux ; mais je crains qu’elle ne soit trop évaporée, trop admirée, trop éprise peut-être d’admiration, trop indolente par le fait pour songer à tenir sa parole. […] Il y a un paresseux garçon de fils qui est venu de Paris à Pétersbourg et qui m’entraîne vers une femme qui me jettera dans le délire sitôt que je m’approcherai d’elle ; vers quelques pestes d’enfants qui me donneront fort à faire pour m’accommodera leurs folies ; vers des amis qui, dix contre un, m’imposeront un mois de peine pour un seul jour de plaisir ; vers des connaissances qui chanteront, riront, pousseront des cris de joie ; comme si ma présence, dont ils se sont merveilleusement bien passés, était essentielle à leur bonheur ; vers mes concitoyens, dont une moitié se couche accablée sous sa ruine et l’autre moitié au désespoir, jusqu’à ce qu’elle se lève pour contempler ce spectacle. […] Ils me chantent pouille tous deux.

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