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330. (1857) Cours familier de littérature. IV « XIXe entretien. Littérature légère. Alfred de Musset (suite) » pp. 1-80

— On croirait que, féconde en rumeurs étouffées, La ville s’est changée en un palais de fées, Et que tous ces granits dentelant les clochers Sont aux cimes des toits des follets accrochés. […] Les siècles maintenant peuvent se remplacer ; Il a si bien gravé son chiffre sur l’écorce Que l’arbre peut changer de peau sans l’effacer. […] Quelle main, de ton luth en parcourant la gamme, A changé tout à coup la clef de ta jeune âme, Et fait rendre à l’esprit le son du cœur humain ? […] Regarde d’en haut ce bas monde : qu’y a-t-il de changé ici que des noms ? […] Enfin, tu as changé de temps en temps de corde et de note sur ton instrument de joie, tu lui as fait rendre, au soir de tes années assombries, des accents inattendus d’inspiration, de douleur, de piété, de pathétique, d’enthousiasme pour la nature, d’invocation à son auteur, qui ont fait frémir à l’unisson d’abord, puis taire d’admiration ensuite nos propres lyres étonnées que les musiciens du temple fussent tout à coup surpassés par un ménétrier du plaisir !

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